Réparation environnementale
L'environnement naturel du Salvador continue de subir les conséquences des tactiques militaires de terre brûlée de l'État, qui sont maintenant exacerbées par le changement climatique. De même, depuis les années 1990, la restructuration néolibérale au Salvador a conduit à des modèles de développement économique axés sur la production industrielle, les secteurs des services, les industries extractives et les envois de fonds, qui ont contribué à la migration de masse, à la pénurie d'eau, à la domination de grandes industries monoculturelles comme celle de la canne à sucre, et à la dépendance croissante des petites actrices et acteurs ruraux à l'égard de l'économie mondiale (Booth et al. 2020). Les moyens de subsistance des populations rurales du Salvador ont été affectés par les sécheresses, l'instabilité des régimes pluviométriques, les catastrophes naturelles et l'usage excessif de produits agro-toxiques. Ainsi, les effets du changement climatique sont exacerbés par un système économique qui favorise la pauvreté et l'inégalité à l'échelle mondiale, une réalité qui rappelle les luttes politiques des années 1970 et 1980 qui ont abouti à la guerre civile (Carte et al. 2019 ; Castellanos et al 2013 ; FAO 2019). L’équipe de recherche de Mémoire Survivante s'engage principalement auprès des populations rurales dont les moyens de subsistance sont basés sur l'agriculture. Dès le début du projet, les membres de ces communautés ont identifié des liens très forts entre la vulnérabilité environnementale, les conflits en cours sur l'accès à la terre et à l'eau, les débats sur le développement économique durable et la mémoire historique locale de la violence coloniale, du contrôle des terres par l'élite salvadorienne et de l'écocide militaire.
C'est dans ce contexte que l’équipe explore la manière dont les espaces géographiques de mémoire et leurs liens avec l'environnement peuvent activer la mémoire collective et les réflexions sur la durabilité dans la sphère publique (Nora 1989). Par exemple, la conception et la construction en collaboration du projet récemment achevé du Mémorial du massacre de la rivière Sumpul mettent l'accent sur la redécouverte, la compréhension et l'utilisation des connaissances historiques sur les méthodes de construction traditionnelles, à faible technologie et à faible impact (telles que l'adobe, les tuiles cuites sur place et l'art céramique) qui perturbent la tendance actuelle à construire principalement avec du béton, de l'acier et d'autres matériaux manufacturés ayant des impacts environnementaux, sociaux et économiques discutables. Dans le cadre des ateliers, l’équipe continue à explorer les victimes non humaines de la guerre, la réparation environnementale et les défis environnementaux actuels.
Dans le cadre de sa recherche postdoctorale, la Dre Giada Ferrucci (postdoctorante à l’Université Western) travaille avec les communautés de Chalatenango et Morazán pour créer un atlas des mémoires environnementales liées à la guerre civile salvadorienne. L’équipe se concentre également sur la préservation collaborative des connaissances sur les ressources environnementales locales, qui sont liées aux autres thèmes de recherche sur la récupération des savoirs et connaissances traditionnelles et la Reconstruction économique locale. Ce volet de cette recherche s'appuie sur les théories latino-américaines de l'économie sociale et solidaire (Coraggio 2010 ; Razeto 2002 ; Melucci 1999 ; de Souza Santos 2002 ; Quijano 2008), qui tentent de décoloniser les relations socio-économiques. Les partisan·es de cette approche soutiennent que les acteurs de la société civile peuvent transformer la société à travers la pluralisation de l'économie tout en critiquant le système capitaliste actuel ; l'assaut des politiques néolibérales dans le Sud mondial ; et la dégradation de l'environnement liée aux mégaprojets, à l'exploitation minière et à d'autres formes d'extraction ; ainsi qu'aux pratiques agricoles industrielles.
Rapports sur les droits humains et la résistance des communautés aux projets miniers
Plusieurs chercheur·euses et activistes de l'équipe de Mémoire Survivante ont collaboré avec des communautés touchées par l'exploitation minière et avec l'Alliance centraméricaine contre l'exploitation minière (ACAFREMIN) pour rédiger des rapports sur la résistance des communautés aux projets d'extraction, aux dommages environnementaux et aux violations des droits humains. Les rapports qui ont été publiés par le projet sont les suivants : The Cerro Blanco Open-Pit Mine in Guatemala [La mine à ciel ouvert de Cerro Blanco au Guatemala] (2022) et Guapinol Resists: Origins of the Mining Conflict in Bajo Aguan, Honduras [Guapinol résiste : les origines du conflit minier à Bajo Aguan, Honduras] (2020).
Ateliers sur le changement climatique
FutureWatch, CCR et d'autres partenaires de Mémoire Survivante collaborent avec des communautés rurales pour organiser des ateliers sur le thème de la réparation environnementale, en particulier sur les défis et les opportunités liés au changement climatique local. Les objectifs de ces ateliers sont d'identifier l'impact de la destruction de l'environnement et du changement climatique pendant et après la guerre civile au Salvador ; et de sensibiliser les membres des communautés locales (jeunes, femmes, hommes, personnes âgées) aux défis du changement climatique et aux possibilités de solutions. Les activités du projet comprennent des réunions de consultation avec les membres de la communauté, le développement du contenu, l'organisation d'ateliers, l'événement de reconnaissance et clôture, le mentorat et l'évaluation du projet.
Atelier sur le changement climatique à San José Las Flores :
Un atelier pilote hybride sur le changement climatique a été organisé le samedi 5 novembre 2023 à la Casa de los Voluntarios [Maison des bénévoles] à San José Las Flores. L'objectif était d'entamer une conversation sur les impacts locaux et les solutions locales possibles au changement climatique. José Agustín García (FutureWatch) a dirigé la première partie de l'atelier sur le changement climatique, ses moteurs, les défis mondiaux et locaux, ainsi que les opportunités locales. La deuxième partie, présentée par Carlos Vargas, a porté sur une solution locale : une cuisinière à bois amélioré. Il s'agit d'une cuisinière peu coûteuse avec un meilleur rendement thermique. Un prototype a été apporté pour la présentation.
Atelier sur le changement climatique à Las Vueltas :
Avec le soutien de plusieurs membres de l'équipe de Mémoire Survivante et d'organisations partenaires locales, l’équipe a a organisé deux ateliers de suivi sur le changement climatique en mai 2024 avec les membres du groupe de broderie du projet (dirigé par Teresa Cruz). Dr José García a animé la première moitié de l'atelier ; il a fourni une vue d'ensemble des concepts du changement climatique, des défis locaux et des opportunités. La seconde partie de l'atelier a été animée par la brodeuse Teresa Cruz ; elle s'est concentrée sur l'exploration de la broderie en tant que moyen de communiquer des messages liés au changement climatique.
Atelier sur le changement climatique à Chalatenango :
Un troisième atelier a été organisé à Chalatenango en collaboration avec le CCR, le Comité des femmes de Mémoire Survivante et Caritas-Chalatenango. L'objectif de cet atelier était d'explorer des idées d'entreprenariat (entreprises vertes) qui pourraient offrir des produits ou des services dans le cadre de solutions locales au changement climatique. L'atelier s'est déroulé en quatre parties. Dans la première partie, dirigée par le Dr José Agustín Garcia, il a donné un aperçu des concepts du changement climatique, des défis locaux et des opportunités. Dans la deuxième partie, Carlos Vargas a présenté un exemple d'entreprise verte : le développement et la commercialisation de cuisinières à bois améliorés. Un prototype fonctionnel a été exposé dans la cour avant du bâtiment, ce qui a permis aux personnes participantes d'examiner la cuisinière pendant la pause déjeuner. La troisième partie a été animée par la Dre Giada Ferrucci ; celle-ci a consisté en un brainstorming sur les idées d'entreprises vertes. Pour cela, les participant·es ont été divisés en trois petits groupes, chacun présentant certains de ses concepts commerciaux, notamment l'artisanat fabriqué à partir de bambou, les produits biologiques naturels et les produits horticoles biologiques. Dans la quatrième partie de l'atelier, le Dr García a expliqué les bases du développement d'un modèle d'entreprise. Les participant·es ont ensuite été invité·es à rédiger un plan d'affaires de base à l'aide du modèle d'entreprise Canvas pour l'une de leurs idées d'entreprise verte.